S'il se trouve quelquefois des coïncidences étranges, il en fut une il y a un peu plus d'une semaine. La veille de mon départ pour N Y, l'émission littéraire La Grande Librairie, mettait sur la scène une rencontre d'auteurs américains, ou plutôt vivants à New-York, et la Librairie de France de New-York. Je savais que cet établissement créé en 1932 par un amoureux de la littérature française, Monsieur Molho, allait devoir fermer ses portes dans moins d'un an. Je ne pouvais manquer de me rendre dans ce tout petit territoire de la culture française. L'accueil est chaleureux. Un petit escalier descend au sous-sol... Et là une caverne d'Ali Baba pour tout amoureux des livres ! D'anciens livres aux reliures de cuir protégées sous une couverture en plastique transparent. Et dans son bureau, qui fut celui de son père, Emmanuel Molho, m'accueille, les yeux brillants de bonheur. Il est heureux et fier de recevoir la visite de Françaises qui viennent le soutenir dans l'épreuve qui le blesse de jour en jour. En septembre 2009, le bail de la librairie que son père avait créée, puis qui avait édité bon nombre de grands auteurs pendant la Guerre, Saint-Exupéry, Sartre, Aron, Mauriac, Maritain et d'autres, atteindra un montant exorbitant, qu'il ne pourra plus payer. La librairie, située au pied du Rockfeller Center sur la 5e Avenue, devra fermer. Le stock phénoménal de livres anciens, de Plutarque à La Fontaine, de Balzac à Saint-Exupéry, de Muriel Barbery à J-M-G Le Clézio pour les écrivains contemporains des belles lettres, devra disparaitre.
La fille d'Emmanuel Molho, Déborah, m'avoue trois jours plus tard lorsque je reviens les voir, qu'une grande partie des livres devra être jetée. Ce n'est pas possible. Il y a bien quelque chose à faire pour éviter cela. En parler déjà autour de soi, sensibiliser les gens à la disparition du dernier lieu de culture et de littérature francophone dans le pays le plus puissant. Cette jeune femme très agréable est heureuse de rencontrer une "Française de Paris". Heureuse aussi que des amoureux de la littérature s'intéresse au triste sort d'une perle de la culture française dans une forêt peuplée de bâtiments gigantesques ; perdue au milieu de l'esplanade bordée de vitrines prestigieuses, l'antre des grands écrivains.
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